Hacker son cerveau pour changer ses habitudes

Changer ses habitudes, ce n’est pas vraiment une question de motivation


Réussir à faire du sport régulièrement, manger ses légumes, se brosser les dents, se lever tôt pour faire son yoga matinal etc. on sait que le succès réside dans la répétition. 

Pourtant, ce n’est pas censé être un effort permanent. Il y a certainement quelques efforts à faire au départ oui, mais ensuite ça tient sur le long terme car cela devient une habitude. L’idée est qu’ensuite il n’y ai plus aucun effort à faire pour réaliser la tâche, voire que cela se fasse de manière automatique sans même qu’on y réfléchisse ou se pose de question.

La clé de toute progression est là : créer, développer et intégrer de nouvelles habitudes.

Ce qui est rassurant sachant ça, c’est que potentiellement nous sommes tous capables d’évoluer et d’intégrer les changements que l’on souhaite. Ce n’est pas réservé aux personnes dotées d’un niveau de motivation exceptionnellement haut à toute épreuve (ce qui d’ailleurs n’existe pas). Il suffit de réussir à définir les habitudes qui vous amèneront vers vos objectifs, les mettre en place et s’y tenir sur la durée.

La question que l’on se pose c’est donc comment le développement d’habitude fonctionne dans notre cerveau ? Et comment faire en pratique pour réussir à intégrer n’importe quelle ou presque, nouvelle bonne habitude ?


Pour répondre à cette question on va s’appuyer sur la psychologie et les neurosciences.

Contrairement à ce que l’on dit souvent, cela n’a pas grand chose à voir avec la motivation. La motivation c’est un concept assez vague, fluctuant, impermanent..bref on ne peut pas vraiment compter dessus 😅

En réalité tout part d’un apprentissage ! Les habitudes ne sont pas des réflexes que l’on intègre, mais elles sont développées, consciemment ou inconsciemment, après que notre cerveau ait appris quelque chose.

En termes plus savants : apprentissage = neuroplasticité, et la neuroplasticité c’est le processus par lequel notre système nerveux change, en réponse à une expérience.

On va donc “apprendre” à notre cerveau à faire l’action que l’on souhaite, tout comme il l’a fait pour le brossage de dents par exemple.

Combien de temps pour former une nouvelle habitude ?


On entend dire qu’il faut 21 jours pour former une nouvelle habitude, d’autres personnes disent que c’est plutôt 30 ou encore 60. Quelle est la bonne réponse ?

On a réalisé une expérience sur plusieurs personnes avec pour objectif de développer l’habitude d’aller marcher après le repas du soir. On a considéré l’habitude acquise lorsqu’il n’y avait plus d’effort mental à fournir pour sortir faire sa marche digestive. 

Et les résultats sont plutôt étonnants : la personne la plus rapide a mis seulement 18 jours, alors qu’il a fallu 254 jours à la personne la plus longue !

Qu’est-ce qui explique ces différences ? 

Une première piste concerne la dopamine, cette molécule que l’on connait bien et qui est associée à la motivation et la récompense. On a constaté que le timing de libération de dopamine pouvait prédire la vitesse à laquelle on sera capable de développer une habitude donnée, et si on va pouvoir s’y tenir ou non.

Aussi, ce qui va expliquer la différence entre les personnes, c’est la capacité individuelle à gérer ce qu’on a appelé la friction du système limbique

Le système limbique c’est la zone du cerveau qui crée les émotions. Pour simplifier, la friction correspond à l’énergie nécessaire à mettre en place un comportement donné.

On peut mesurer cette friction à titre individuel, et cela déterminera notre capacité à former une nouvelle habitude.

Pour changer ses habitudes, est-ce nécessaire de forcer des horaires fixes ?


Concernant la formation d’habitude, on en sait un peu plus sur comment ça se passe au niveau des neurones : certains d’entre eux s’occupent de regrouper plusieurs petites tâches en un groupe de tâches

Prenons l’exemple de se brosser les dents : cela comprend le fait d’aller dans la salle de bain, prendre la brosse à dents, mettre du dentifrice etc. 

Dans le contexte d’habitude, les neurones regroupent toutes les petites étapes en un groupe, qui serait dans notre exemple “l’habitude de se brosser les dents”. Et cette habitude est bornée : il y a un début et une fin.

Les neurones impliqués s’activent dès que la routine en question démarre et s’activent à nouveau lorsqu’elle est terminée.

Et cette activation n’est pas liée à un moment précis de la journée, mais plutôt par rapport à notre état mental et physique : si on est en pleine forme, concentré ou à l’inverse fatigué etc.

L’idée est donc d’associer une habitude, à une phase de la journée, plutôt qu’un horaire précis.

En se basant sur comment le cerveau fonctionne on peut définir un système qui va nous aider à mettre en place plus rapidement une routine ou habitude souhaitée. On va tirer parti du rythme naturel de notre organisme et notre cerveau.

On va commencer par diviser une journée de 24h en 3 phases :

Phase 1 : entre 0 et 8 heures après le réveil
Phase 2 : entre 9 et 15 heures après le réveil (et donc 0 à 7 heures après la phase 1)
Phase 3 : entre 16 et 24 heures après le réveil (et donc 0 à 9 heures après la phase 2)

Phase 1 :


Après le réveil, le taux de cortisol, la température corporelle, les niveaux de dopamine, épinéphrine et norépinéphrine sont élevés. 

Pour amplifier les bénéfices de cet état physiologique, sur la concentration et le niveau d’alerte notamment, on conseille :
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  • 🌞 Dans les 30 minutes après le réveil, s’exposer directement à la lumière du jour (en marchant ou posée sur votre terrasse par exemple, ou mettre au maximum les lumières artificielles s’il ne fait pas encore jour).
  • ❄️ S’exposer au froid, sous forme de douche froide par exemple (ou tout simplement marcher dehors vu les températures en ce moment).
  • ☕️ Privilégier la caféine durant cette phase.
  • 🍳 Jeûner ou manger des aliments riches en tyrosine (œuf, fromage, banane, protéine de soja, noix etc.).
  • 🏋️‍♂️ Privilégier l’exercice physique durant cette phase, et idéalement au plus tôt.

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Si vous voulez tout faire d’un coup, vous pouvez sortir dehors dans le froid, avec votre thermos de café et avancer en faisant des fentes par exemple 😅

Tout cela va vous placer dans un état dans lequel vous avez le plus de chances de réussir à vous lancer dans les activités qui ont un fort degré de friction du système limbique pour vous.

En d’autres termes, si vous avez une activité que vous souhaitez réaliser régulièrement, mais que vous avez beaucoup de mal à faire, privilégiez la phase 1 pour la mettre en place. 

Il n’est pas nécessaire que ce soit toujours exactement le même horaire, on veut simplement profiter de l’état physiologique du corps, qui est idéal dans les 8 premières heures après le réveil.

Phase 2 :


Naturellement, les niveaux de norépinéphrine, épinéphrine, dopamine et cortisol commencent à baisser lentement. Et le taux de sérotonine commence à augmenter, on a plus de facilité à être détendu. 

Durant cette phase, notre état mental et corporel est bénéfique pour créer et consolider certains types d’habitude, et l’on peut amplifier cet état de bien-être :

  • 💡 Commencer à diminuer progressivement la lumière environnante.
  • 🧘 Faire une séance de méditation, yoga nidra ou auto-hypnose.
  • 🛀🏻 Prendre un bain chaud (ou une douche), un sauna.

L’idée est de diminuer notre niveau de stress, et de profiter de ce moment de la journée pour faire les activités où le degré de friction est plus faible, bien que vous n’ayez pas encore réussi à en faire une habitude. 

Il y a un peu de challenge, mais ça ne vous demande pas non plus des tonnes d’énergie pour vous y mettre.

Petite parenthèse : ce que l’on vient de voir peut expliquer pourquoi si par le passé vous avez tenté sans succès de vous tenir à une nouvelle activité, c’est peut être parce que vous essayiez de la réaliser dans une phase qui n’était pas optimale par rapport à ce que l’on vient de voir.

Et si on fait du sport pendant la phase 2 ? 

C’est aussi mon cas, même si ce n’est pas idéal pour le sommeil, la recommandation est de s’exposer à la chaleur (bain chaud…), méditer etc. le plus rapidement possible après la séance (dans l’heure idéalement), ceci afin de pouvoir entrer plus efficacement en phase 3, qui correspond à la partie de la journée où l’on dort, et qui est toute aussi importante dans le processus d’apprentissage.

Comment sait-on qu’une habitude est acquise et ancrée dans notre cerveau ? Tout simplement quand elle devient indépendante du contexte, c’est-à-dire de la phase de la journée. Vous êtes capable de la réaliser n’importe quand, sans effort ou presque.

Accélérer ou consolider la formation d’une habitude en particulier grâce à la dopamine


Je vais terminer en vous expliquant comment on peut accélérer ou consolider la formation d’une habitude en particulier en utilisant le système de récompense lié à la dopamine.

Quand on attend une récompense après un comportement donné, et que la récompense arrive, on augmente nos chances de réaliser à nouveau ce comportement.

Bien sûr, il ne faut pas que la récompense soit négative et vienne contrebalancer les effets recherchés par le comportement donné. Par exemple, on va préférer associer un moment de détente dans la salle de bain plutôt qu’un fast-food après la séance de sport 😅.

Le corps produit de la dopamine quand on a notre récompense, et étonnement, il en produit encore plus quand la récompense n’était pas prévue. Bon malheureusement sur ce point c’est plus compliqué d’avoir un levier d’action…


Mais prenons l’exemple d’une habitude liée au travail : vous vous levez le matin et réussissez à vous tenir à un créneau d’écriture. Cela fait 20 minutes, vous êtes concentrée et même si votre créneau d’écriture n’est pas terminé votre cerveau commence déjà à libérer de la dopamine par anticipation

Ce qui est plutôt une bonne chose quand on sait que la dopamine est liée à l’action, cela va renforcer votre capacité à aller au bout de la tâche en cours.

Maintenant imaginons qu’avant de terminer vous êtes coupée par un appel téléphonique ou alors que vous allez vous déconcentrer en allant checker Instagram. Si cela dure trop longtemps et vous empêche de terminer votre créneau d’écriture prévu, alors cette fois votre niveau de dopamine va faire l’inverse et carrément baisser en dessous de son niveau de base.

On va donc chercher à utiliser le système de libération de dopamine par anticipation (qui va nous mettre dans les meilleures conditions possibles d’énergie et donc d’action), en faisant une sorte de visualisation avant de terminer (voire de commencer) la tâche à réaliser. 

Une façon simple de le faire est de noter en détail la liste des étapes avant (dans les 15 minutes avant par exemple), pendant et après. Plus c’est précis, plus ce sera efficace. Et pas uniquement les étapes concrètes, mais aussi comment vous vous sentez à chaque étape.

Attention il ne s’agit pas non plus de se mentir avec de l’auto-persuasion qui de toute façon ne marchera pas. Il faut avoir une vision juste, avoir conscience de la difficulté de démarrer la tâche tout en visualisant également les aspects positifs.

Je vais prendre un exemple précis pour que ce soit plus clair : pour optimiser ma santé, je souhaite mettre en place l’habitude de faire 30 minutes de cardio plusieurs fois par semaine.

Comme on a vu précédemment, on va déterminer à quelle phase de la journée je vais mettre en place mon cardio, pour limiter la friction et donc mettre toutes les chances de mon côté pour m’y tenir.

Dans cet exemple je vais choisir la phase 1, juste avant mon repas de midi. Je vais donc faire cette fameuse liste :

  • Il est 11h, j’ai terminé ma matinée de boulot, je suis prête à faire une pause.
  • Je vais dans la salle de bain mettre une tenue de sport et me préparer pour aller courir. On ne va pas se mentir je n’aime pas particulièrement ça le cardio.
  • J’enfile mes baskets et une veste, et je descends les escaliers pour sortir de l’immeuble.
  • J’inspire un grand coup et je me lance.
  • Ce n’est pas agréable mais j’ai l’avantage d’avoir un itinéraire plutôt agréable, surtout quand il fait beau.
  • Pour oublier la difficulté, j’écoute un podcast sur un sujet qui m’intéresse, au final les 30 minutes passent plutôt rapidement.
  • Je rentre prendre ma douche.
  • J’ai la double récompense du bien-être ressenti après avoir fini (les hormones tout ça) et de savourer encore plus mon déjeuner car le cardio a tendance à monter mon appétit en flèche.
  • Je suis zen et éprouve la satisfaction d’avoir fait mon cardio du jour !


Comme je vous disais le but est d’être réaliste sur ce qu’il se passe avant, pendant et après, tout en se concentrant sur le positif, de façon à commencer à libérer de la dopamine avant même d’avoir commencé et donc d’avoir plus de facilités à vous mettre en action.

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